Si les jeunes filles peuvent aujourd’hui passer le baccalauréat, suivre des études supérieures, devenir avocates, médecins ou encore parlementaires, il fut un temps ou ce n’était pas le cas…

 

Élisa Lemonnier (1805-1865), créatrice de la première école pour toutes

Elle a fondé, en 1862, la première école professionnelle pour jeunes filles. Épouse d’un professeur de philosophie engagé, Elisa Lemonnier entend sortir les femmes et filles d’ouvriers de l’illettrisme et surtout de la dépendance. Elle crée le 1er octobre 1862, la première école accessible à toutes pour endiguer l’ignorance et la soumission.
Soutenue politiquement et surtout financièrement, l’objectif qu’elle affiche est clair : « la fondation et l’entretien à Paris d’une école professionnelle pour les jeunes filles, et la création d’un cours destiné à préparer aux divers emplois du commerce pour celles qui veulent suivre une carrière et pour lesquelles aucune institution spéciale n’a encore été fondée à ce jour. » Dès sa création, l’école connaît un rapide succès. En dix mois, plus de 80 jeunes filles sont inscrites. Elles sont 150 au bout d’un an. On dénombrera huit écoles Lemonnier à Paris. Elisa décède le 5 juin 1865. Son combat précède de vingt ans l’action du député Camille Sée et la loi promulguée le 21 décembre 1880 qui instaurera les lycées obligatoires pour jeunes filles.

Julie-Victoire Daubié (1824-1874), première bachelière

Le 17 aoû 1861, Julie-Victoire Daubié obtient, à 37 ans, son baccalauréat. C’est la première bachelière en France. À cette époque, la femme est considérée dans l’Hexagone non pas comme inférieure à l’homme, mais comme façonnée différemment par la nature. Elle a pour mission de s’occuper de la famille et de veiller à son épanouissement. Une aberration pour Julie-Victoire qui entreprend très vite de bousculer les traditions.
Née le 26 mars 1824, cette jeune fille issue d’une famille modeste a perdu son père peu après sa naissance. Elevée par son grand frère, prêtre, elle aura la chance de recevoir une éducation éclairée. Elle étudie à l’époque, l’histoire, la géographie, le latin et le grec.

Jeanne Chauvin (1862-1926), première avocat

Le combat de cette femme, première avocat, pour contraindre le monde patriarcal des magistrats et parlementaires à autoriser les femmes à s’inscrire au barreau, fut exemplaire. Née en 1862 dans le Loiret, d’un père notaire, Jeanne est une jeune fille brillante. Obtenant le baccalauréat de sciences et celui de lettres en même temps, elle deviendra l’une des premières « docteur en doit » après avoir obtenu une licence de droit et une autre de philosophie. Son but est simple : plaider pour la bonne cause et donc devenir avocat. Malgré ses diplômes, Jeanne se voit refuser l’accès au barreau en 1897. Le motif invoqué est tout simplement que la loi n’autorise pas les femmes à plaider. Une plaisanterie ? Non une réalité. En 1892, elle écrira dans L’Illustration du 16 juillet un pamphlet annonçant la fin de la supériorité. Elle sera chargée dès lors de dispenser de nombreux cours dans plusieurs lycées pour jeunes filles. Mais sa vocation reste de plaider et de côté-là, rien n’y fait, le corps de métier s’y oppose. Jeanne Chauvin se battra alors durant trois ans. À coups de publications et de revendications juridiques en tout genre. C’est finalement en 1900, le 19 décembre, qu’elle prêtera serment et deviendra ainsi la première femme avocaten France après le vote d’une loi le premier du même mois.

Madeleine Brès (1842-1921), première médecin

Elle est la première femme à avoir reçu le titre de docteur en médecine. Issue d’un milieu modeste, Madeleine a affirmé dès l’âge de 8 ans sa vocation. À l’époque, les femmes intéressées par la médecine finissaient au mieux infirmières. Mais c’était sans compter sur le volontarisme de Mlle Brès. Lorsque la jeune fille tente de s’inscrire en faculté, on lui explique qu’elle doit obtenir non seulement le baccalauréat de sciences comme les autres candidats, mais aussi celui de lettres. Qu’à cela ne tienne, Madeleine passera les deux avec brio. Une fois bachelière, elle se représente et subit un second refus, pas vraiment justifié. On explique simplement à la jeune fille que la « question reste délicate ». Ce sera finalement l’impératrice Eugénie qui fera pression pour qu’elle soit admise en 1869 en faculté de médecine.

Marthe Simard (1901-1993), première parlementaire

Avant même que les Françaises acquièrent, enfin, le droit de voter, en avril 1944, ou d’être élues, elle devient membre de l’Assemblée consultative provisoire qui siège à Alger de novembre 1943 à juillet 1944. Née à Alger le 6 avril 1901, Marthe Simard est une figure de la Résistance. Partie vivre avec son second mari au Canada en 1932, la jeune femme est très sensible aux événements qui se déroulent en Europe. L’appel de Londres du 18 juin 1940 sonne, pour elle, comme un signe de la nécessaire mobilisation outre-Atlantique. Dès lors, la jeune femme va mener une campagne active au Canada pour faire comprendre l’action de la France libre et surtout celle du général de Gaulle, perçu par certains comme un homme avide de pouvoir. Marthe Simard s’emploie à trouver des fonds pour les marins et aviateurs qui transitent par le Canada. Dès 1942, elle crée des comités de la France libre et s’exprime autant qu’elle le peut sur les ondes de Radio Canada. Son combat ne passe pas inaperçu et de Gaulle la remarque. Le 23 juin 1942, le Général promet que lorsque l’ennemi sera chassé, tous les Français et Françaises voteront, ensemble, pour une Assemblée nationale. En attendant la Libération, une assemblée consultative est mise en place à Alger. Les figures de la résistance y sont nommées. Marthe Simard est invitée à y siéger le 20 octobre 1943, en tant que représentante des mouvements de la Résistance extérieure.